Chaque tribu, chaque village kwakwaka’wakw connaît l’histoire de sa venue au monde. Ces récits sont parfois qualifiés de mythes, mais il s’agit en fait de notre histoire orale et ils racontent la rencontre de notre peuple avec des créatures surnaturelles au commencement du monde.
L’histoire orale kwakwaka’wakw relate comment les ancêtres de chaque famille ont obtenu les chants et les danses montrés dans les potlatchs. Chaque famille possède certaines danses qu’elle est en droit de montrer. Parfois une famille a ces privilèges parce que ses ancêtres les ont reçus de créatures surnaturelles. Dans d’autres cas, il s’agit de butins saisis lors de raids, ou alors ce sont des cadeaux de mariage. Les Kwakwaka’wakw tiennent beaucoup à leurs danses parce que les droits héréditaires sur ces danses sont une manière de montrer l’histoire et les traditions de leur famille.
Danser n’est pas seulement un droit et un privilège kwakwaka’wakw, c’est aussi une devoir. Comme les chefs l’ont dit à Franz Boas (un anthropologue qui a consacré beaucoup de temps à étudier la culture kwakwaka’wakw) lorsqu’il assista pour la première fois à une cérémonie à Fort Rupert, « C’est une loi stricte qui nous commande de danser. » Partager nos danses n’est pas seulement une occasion de les montrer, c’est l’une des manières par lesquelles nous assumons nos responsabilités en tant que Kwakwaka’wakw.
Le T´seka
De nos jours, les danses du potlatch se divisent en deux cycles. Le premier rassemble les danses du cérémonial d’hiver ou T´seka. On reconnaît les danses du T´seka au fait que leurs accoutrements comportent de l’écorce de cèdre rouge. Pour cette raison, les danses du T´seka sont aussi appelées « danses de l’écorce de cèdre rouge. » Un autre indice pour les identifier et que presque toujours, les danseurs effectuent un tour sur eux-mêmes dans le sens antihoraire lorsqu’ils entrent et sortent de l’aire de danse de la maison cérémonielle. Le second cycle s’appelle les danses de la paix ou Tła’sala.
Les danses du T´seka étaient montrées dans les potlatchs organisés durant les mois d’hiver, de novembre à mars. En hiver, plusieurs créatures surnaturelles (des esprits) reviennent vivre près des villages et s’emparent d’hommes et de femmes qui deviennent alors possédés (sous le contrôle ou sous l’emprise de cet esprit, ils deviennent comme lui). Les familles de ceux qui devenaient possédés par ces forces surnaturelles tentaient de les attraper et de les calmer ou de les apprivoiser suffisamment pour qu’ils puissent vivre à nouveau parmi eux.
Cette époque de l’hiver durant laquelle des personnes étaient possédées puis apprivoisées était très importante. Au cours de cette période, les gens changeaient de nom; ils adoptaient leurs noms du cérémonial d’hiver, ne revenant à leurs noms séculiers qu’à la fin de la saison. C’est l’époque où les chefs et leurs familles invitaient des membres d’autres villages à venir assister à leurs danses cérémonielles lors d’un potlatch.
Les êtres surnaturels les plus importants aux yeux des Kwakwaka’wakw sont :
- Baxwbakwalanuksiwe’ - le mangeur d’hommes qui vit à l’extrême-nord du monde. Cet anthropophage habite dans les montagnes avec ses nombreux serviteurs; la cheminée de sa maison crache toujours une fumée rouge. Les gens qu’il possède deviennent des Hamat´sa, des cannibales qui désirent ardemment de la chair humaine, à l’image de Baxwbakwalanuksiwe’.
- Winalagalis - cet esprit est lui aussi originaire du nord, il voyage en permanence dans un invisible canot en cuivre. Le seul signe de son passage est le bruit de sa pagaie en cuivre qui frappe le rebord du canot. Son nom signifie « Partant en guerre à travers le monde » et ceux qu’il possède deviennent très agressifs.
- Madam - Cet être surnaturel vit au sommet d’une haute montagne près du lac Woss (sur l’île de Vancouver) et il donne le pouvoir de voler à tous ceux qu’il possède.
Teindre en rouge l’écorce de cèdre
Chaque danse du cérémonial T´seka s’accompagne d’un accoutrement particulier que l’initié utilise lorsqu’il ou elle montre sa danse. Certains de ces insignes sont faits d’écorce de cèdre teinte en rouge ou laissée écrue. Pour créer l’un ou l’autre de ces accessoires (collier, coiffure, jupe, cape, jambière) l’écorce de cèdre était travaillée puis elle était teinte dans un bain du jus de l’écorce interne de l’aulne. De nos jours, quand on fabrique de nouveaux insignes pour le T´seka, on colore généralement l’écorce de cèdre en rouge à l’aide de teinture à tissu.
La plupart des insignes d’écorce de cèdre sont faits en écorce partiellement écrue et teinte en rouge. La seule danse dont l’accoutrement est complètement teint en rouge est aussi la plus importante des Kwakwaka’wakw: le Hamat´sa